Cela peut paraître ambitieux pour celui qui n’a pas participé au mouvement des Gilets Jaunes. Les voitures tournent à l’essence, nous on carbure à l’ambition. Depuis le 17 novembre, nous sommes des centaines de milliers à passer à l’action. On se rencontre sur les ronds-points, on s’organise pour bloquer l’économie, on se défend ensemble contre la police en manifestation. On n’a jamais vu une telle détermination des « gens de rien » depuis des lustres. Et on ne compte pas s’arrêter là. Ce journal, c’est pour ça. C’est pour continuer. Et surtout, c’est pour gagner. Mais gagner quoi ? Ou plutôt jusqu’où ? Personne n’est en mesure d’y répondre mais nous prenons le parti de ne pas brider nos ambitions. Nous sommes pour l’extension et l’approfondissement du mouvement, contre une vie trop chère pour être vécue. Qu’il rentre dans le quotidien de tous les gens qui galèrent dans ce pays. Qu’il déborde des frontières de la France sans aucune modération, comme c’est déjà le cas en Belgique, en Allemagne, en Espagne, en Irak, au Soudan etc. Pour cela, le mouvement n’a pas besoin de direction. Bien au contraire, ce que les politiciens appellent « orientation », qu’elle soit nationaliste, confusionniste, citoyenniste ou raciste, c’est une façon de canaliser la révolte, d’en écraser certains avant d’écraser tout le monde, pour que les bourges continuent à se gaver. Dans ce journal, on cherche plutôt à savoir comment on peut rendre ce mouvement moins contrôlable et plus fort qu’il ne l’est déjà. Comment on développe des solidarités avec tous les prolos sans exception pour tenir ensemble contre cette vie misérable ? On y discute des stratégies de lutte, comme la grève ou encore le blocage, mais aussi des manœuvres ennemies, en particulier de la répression qui nous frappe et de la réponse pratique qu’on doit fournir pour ne laisser personne sur le carreau.
On voit la presse, la classe politique et les patrons s’époumoner pour diviser le mouvement. Ils crient « casseurs », « violence », « terroristes ». Ils n’ont que ça à la bouche pour nous dissuader de lutter, et ce qui est magique, c’est que leur tour ne fonctionne pas. On ne va pas pour autant dire que tout est rose dans ce qu’on vit depuis deux mois. L’engagement est exigeant, les vautours sont à l’affût, nos galères de fin de mois sont toujours là et l’horizon qu’on nous promet ressemble à un film apocalyptique. Nous refusons ce futur et c’est pour cette raison qu’on bricole les moyens d’en finir. On en propose quelques uns dans les pages qui suivent. Jaune, le journal pour gagner."
On vous souhaite une bonne manif et on espère à très vite !
Jaune, le journal pour gagner